Pourquoi les Balkans affichent un taux de suicides en prison plus bas que dans les autres pays ?

Le taux de suicide dans les pénitenciers balkaniques est peu élevé par rapport au reste de l’Europe. Un phénomène qui s’explique notamment par la composition différente de sa population carcérale.

Published On: mai 14th, 2018
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Pourquoi les Balkans affichent un taux de suicides en prison plus bas que dans les autres pays ?

Le taux de suicide dans les pénitenciers balkaniques est peu élevé par rapport au reste de l’Europe. Un phénomène qui s’explique notamment par la composition différente de sa population carcérale.

La prison de Lepoglava (Croatie) | DR

Dans les pays du sud-est de l’Europe, le taux de suicide en prison est beaucoup plus bas que la moyenne européenne. Si l’on examine la période allant de 2011 à 2015 , dans les Balkans, il y a eu en moyenne chaque année 53 cas de suicide pour 100 000 détenus, contre 87 cas en moyenne pour le reste de l’Europe. Ces chiffres, recueillis tous les ans par le Conseil de l’Europe , ne sont publiés qu’après avoir été soigneusement vérifiés. Ils sont donc généralement considérés comme fiables. Les chiffres de la Bosnie-Herzégovine et du Kosovo ne sont actuellement pas disponibles.

De plus, dans le sud-est de l’Europe, il y a une différence relativement contenue entre le taux de suicide au sein de la population carcérale et celui de la population générale : les détenus ont tendance à se suicider cinq fois plus environ que le reste de leurs concitoyens. Dans les autres pays européens, comme la France, la Belgique et la Norvège, la probabilité de suicide parmi les détenus est beaucoup plus élevée, dix fois plus par rapport à leurs concitoyens en liberté. Faut-il en conclure pour autant que le traitement des détenus dans les prisons balkaniques est meilleur que dans le reste de l’Europe ?

La composition différente de la population carcérale des Balkans par rapport au reste de l’Europe invite néanmoins à la prudence avant de parvenir à une telle conclusion. Plusieurs études montrent, en effet, une relation significative entre le profil général des détenus et leur taux de suicide : les violences auto-induites tendent à être plus fréquentes dans les systèmes carcéraux où le taux d’emprisonnement est peu élevé, c’est-à-dire où l’on incarcère relativement peu de personnes.

Dans ce contexte, celles qui se retrouvent en prison parce qu’elles n’arrivent pas à accéder à des peines alternatives souffrent souvent de graves problèmes psychiques ou sont en situation de grande marginalisation sociale, et donc particulièrement fragiles. Les suicides en prison ont aussi tendance à être plus fréquents là où l’on a davantage recours à l’incarcération préventive. Il est avéré que les personnes les plus à risque sont celles qui ont été arrêtées depuis peu ou sont en attente de jugement.

Dans les pays des Balkans, le taux d’emprisonnement est plutôt élevé – les prisons ne sont donc pas peuplées de personnes particulièrement fragiles – alors que le recours à l’incarcération préventive est plutôt limité. C’est la combinaison de ces deux facteurs qui rend la population carcérale de ces pays moins exposée au risque de suicide par rapport au reste de l’Europe. 

En dépit de ce tableau globalement positif pour la région, il existe des variations notables entre les différents pays. Le taux de suicide en prison est extrêmement bas, par exemple, en Croatie (19 cas par an pour 100 000 détenus, un taux identique à celui du reste de sa population – cas unique en Europe), tandis qu’il est cinq fois plus élevé chez sa voisine, la Slovénie.

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